Le 86e Régiment d'Infanterie

Au Puy était cantonné un régiment, le 86e de ligne,

devenu par la suite le 86e Régiment d'Infanterie.


Le colonel Couturaud (1909)
Le colonel Couturaud (1909)

 

En 1914, le 86e, constitué de trois bataillons, fait partie de la 49e brigade d'infanterie ; d'août 1914 à juin 1915, de la 25e division d'infanterie ; du 13e corps d'armée, puis de la 120e division d'infanterie jusqu'en  novembre 1918.

 

Le 86e s'illustrera notamment à Baccarat, dans la Somme et à Verdun, et recevra deux citations à l'Ordre de l'Armée, et une citation à l'Ordre du Corps d'Armée.

 

 

Du 2 au 5 août 1914, le 86e R.I., sous les ordres du colonel Couturaud, se prépare activement au départ...

 

Les hommes de la Haute-Loire et du Cantal, qui constituent le régiment, accourent, pleins de certitudes en la victoire, pour prendre leur place dans les rangs.

 

Le 5 août au soir, les trois bataillons traversent successivement Le Puy pour se rendre de la caserne à la gare. Malgré une pluie torrentielle, les habitants sont venus nombreux pour les saluer. Trois trains vont conduire les hommes à Darnieulles, à 8 kilomètres à l'ouest d'Epinal. C'est dans cette zone que se concentrera la 25e division. En attendant que les trois unités soient prêtes à partir  vers la frontière, le régiment se cantonne dans la région de Dompaire, Madone, Damas, à une dizaine de kilomètes à l'ouest de la gare de débarquement.

 

L'effectif au jour du départ est constitué de 60 officiers, 197 sous-officiers et 3154 hommes de troupe.

 

Le 9 août, le 86e R.I. fait partie de la 1e Armée, sous les ordres du général Dubail.


Ancerviller

Le 10 août au matin, la division est prête à marcher. Le régiment s'achemine sous la chaleur vers le nord-est, traverse la Moselle et le canal de l'Est à Thaon-les-Vosges, et vient se cantonner dans la région de Domevre-sur-Durbion et Badmenil-aux-Bois, à 15 kilomètres au nord d'Epinal.

 

Le 11 août, le régiment cantonne dans la région de Padoux et Bult, à 8 kilomètres au sud-ouest de Rambervillers.

 

Le 12, après une troisième étape, les premières impressions de la bataille sont révélées aux hommes du 86e R.I. Les premiers blessés arrivent par groupes, ceux qui ne peuvent marcher sont transportés sur des charriots. Ce sont des hommes du 17e R.I. et du 17e bataillon de Chasseurs.

 

Le 13 août, le 86e R.I. arrive dans la vallée de la Meurthe, qu'il traverse à Baccarat, et continue vers le nord-est jusqu'à Mervillers. C'est dans cette région que le 86e stationne en avant-postes devant les villages de Pexonne, Saint-Maurice, Saint-Pôle, Montigny et Vaxainville. On aperçoit au-delà l'ennemi...

 

Le 15 août, le régiment prend une formation d'approche pour se porter à l'attaque des crêtes au sud d'Ancerviller, cote 314, et du bois des Haies, à l'est de ce village. Dès que les éléments du 3e bataillon arrivent à la cote 314, ils sont soumis au feu de l'artillerie ennemie. La cote 314 est occupée et le bois des Haies est atteint. L'ennemi se retire en hâte vers le nord-ouest.

 

Le soir, les hommes stationnent sur le terrain conquis, au nord-est d'Ancerviller.

 

Le 86e RI compte 3 hommes tués, 21 disparus, 37 blessés, 4 évacués.


Sarrebourg

Dès le 15 août, le 86e R.I. reprend sa marche vers le nord-est, traverse Cirey-sur-Vezouse. Les éléments de tête du 3e bataillon sont à Bertrambois, dernier village français, à quelques centaines de mètres de la frontière. Le régiment stationne dans ce village et dans les bois au sud. Il pleut sans arrêt.

 

Le 16 août, la marche reprend. A la frontière, qui longe le bois des Harcolins, les derniers cavaliers ennemis se montrent. La tête du régiment avance, la frontière est atteinte à 800 mètres au nord-est de Bertrambois. De bonne heure, la forêt est traversée. Niderhoff, sur la Sarre Blanche, est le premier village allemand occupé. Le soir, tout le régiment est en pays ennemi, soit dans Niderhoff, soit dans les bois au sud.

 

Le 20 août, les obusiers ennemis de 240 se sont révélés. Le régiment est engagé assez tard dans l'après-midi. 

 

Les 1er et 3e bataillons reçoivent les premiers l'ordre de marche. Les compagnies en ligne les unes derrière les autres doivent attaquer, progresser et donner l'assaut. Elles subissent le feu de l'infanterie portée vers la cote 312 et la route d'Imling. Le déploiement a commencé à la cote 302, à 1.5 km au sud-ouest d'Imling. Les bataillons ont également à subir le feu d'une batterie établie à la cote 312, ainsi que d'une autre batterie semblant portée à la lisière est du bois de Rinling, prenant le bataillon en enfilade.

 

Le canal de la Marne au Rhin est rapidement franchi, malgré le tir violent de l'artillerie lourde allemande. Dès que le canal est franchi, les hommes se trouvent sous le feu de l'artillerie, de l'infanterie et des mitrailleuses ennemies. L'infanterie allemande, abritée dans des tranchées bétonnées, exécute des feux extrêmement meurtriers, sur un terrain connu et repéré. Bientôt, l'avance devient impossible.

 

Le capitaine PIchon, dirigeant la 10e compagnie, qui "s'est élancé dans un élan superbe, à la tête de la compagnie déployée, entraînant toute la ligne sous une grêle de projectiles", tombe mortellement atteint. Il est cité à l'ordre de l'armée.

 

Le 86e combat jusqu'à une heure avancée de la nuit. Le lendemain, il reçoit l'ordre de se replier. 

 

La retraite de Lorraine commence.

 

A cette date, 726 hommes et 17 officiers du 86e Régiment d'Infanterie ont été tués, blessés ou portés disparus, soit 743 hommes sur les 3 411 qui constituaient l'effectif au jour du départ.


Baccarat

Le 21 août au matin, le 86e R.I. est dispersé dans la région de Nitting. Mais chacun des groupes est ordonné, commandé. Le groupe principal se porte au nord du village, face à l'ennemi qui bombarde avec les mortiers de 210. Dans la matinée, la retraite commence. Le régiment revient vers la région de La Neuville-les-Lorquin.

 

Vers le soir, le régiment refait vers le sud le chemin qu'il a parcouru quelques jours auparavant. La frontière est franchie. Dorénavant, c'est le sol de la patrie qui va être le terrain des combats. Bertrambois et Cirey sont rapidement traversés, et le 21 au soir, le régiment stationne dans l'ouest et le sud-ouest de Cirey.

 

Dès le 22, les bataillons se regroupent et se reforment. La marche reprend. Plusieurs unités restent plusieurs jours sans ravitaillement. Le régiment s'établit au nord, sur une ligne Montigny, Saint-Pôle, Saint-Maurice. Le mouvement de retraite reprend le lendemain. Le 86e arrive sur la Meurthe, à Baccarat, et stationne alors au sud de la rivière, en tenant Baccarat et les hauteurs sud de Glonville.

 

Le 24 août, après être resté sur ces positions durant toute la journée, le régiment reprend son mouvement de retraite au soir. Pour reprendre la route de Rambervillers, les unités doivent passer à Baccarat, où elles arrivent en partie par l'ouest. Le colonel Couturaud et le lieutenant-colonel Barral sont au carrefour de la sortie ouest de la ville, battu sans arrêt par l'artillerie ennemie. C'est là qu'ils sont tous deux mortellement atteints. Ils sont cités à l'Ordre de l'Armée. Le capitaine Morel, adjoint du colonel, est blessé. 

 

Le mouvement continue.

 

Le soir, le régiment entier est en retraite sur Rambervillers. Le 86e R.I. reçoit alors l'ordre d'attaquer Baccarat dès le 25 au petit jour par surprise.

 

A 3 heures, les dispositions d'attaque sont prises. Le régiment se remet en route et arrive aux abords de la ville. 

 

Les Allemands sont installés sur les terrasses de la cristallerie, d'où ils ont une vue imprenable sur le pont que doit traverser coûte que coûte le 86e R.I. et disposent de mitrailleuses. Le pont, large de douze mètres, représente un goulot d'étranglement, la plupart des soldats français ne savent pas nager, le pont est donc le seul moyen de parvenir sur la rive droite de la Meurthe. 

 

Le combat fait rage, les hommes du 86e R.I. tentent de passer le pont, mais sont fauchés par les mitrailleuses. 

Pour cette seule journée du 25 août 1914, 670 hommes et 19 officiers du 86e Régiment d'Infanterie sont tués, blessés ou portés disparus.

 

Le 26 août au matin, le 86e R.I. ne compte plus que 750 hommes et 7 officiers...

Les armées françaises viennent de gagner la Bataille de la Marne, et poursuivent sur le front l'ennemi qui bat en retraite.

Plus de 1 200 hommes arriveront en renfort fin août.

 

Le 86e R.I. sera alors envoyé en avant-postes près de la zone occupée.

La guerre des tranchées commence...


J.M.O. du 86e RI - 25 au 27 août 1914

Transcription du J.M.O.                                                                             Source : www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr

25 août

Le régiment reçut l’ordre d’attaquer Baccarat.

Cet ordre fut communiqué verbalement aux officiers vers carrefour route Bizon Baccarat et Baccarat-Ménil.

Le Colonel indique l’ordre de marche des bataillons 3e, 1er, 2e.

Le régiment en colonne par 4 précédé d’une AG entra dans Baccarat et arriva jusqu’au pont.

Une fusillade nourrie (mitrailleuses et fusils) accueillit les premiers éléments dès qu’ils s’engagèrent dans la rue qui conduit au pont. Cette rue était complètement balayée par les balles.

Après quelques arrêts et une marche assez lente par suite de la nécessité de passer le long des maisons, les unités arrivèrent successivement au pont.

L’attaque ne réussit pas. Les bataillons se reportèrent en arrière et dépassèrent le 38e qui se trouvait dans le bois SO de Baccarat.

La plupart des éléments du 87e se reconstituèrent au carrefour des routes Baccarat-Bazien et Baccarat-Ménil. Le mouvement en avant sur Baccarat fut de nouveau ordonné.

Ce mouvement fut suivi, peu après, d’un mouvement de repli sur Sainte-Barbe.

Dans cette marche en retraite, les unités étaient représentées par un nombre d’hommes assez faible.

En cours de route, le Colonel reçut l’ordre de participer à une attaque qui allait être ordonnée sur les bois de la Pêche (1 Km NO de Sainte-Barbe).

Deux compagnies seulement furent constituées. L’une sous les ordres du capitaine Chaumeton, l’autre sous les ordres du capitaine Blanchard.

Après une demi-heure de stationnement, l’assaut fut donné sur la lisière du bois.

L’ennemi se retira en abandonnant la lisière.

La poursuite se fit, mais elle fut arrêtée par une contre-attaque ennemie.

Le mouvement de repli commença.

Pendant l’assaut, le Colonel Couturaud, commandant le régiment, tomba grièvement blessé.

Les éléments du 87e se retrouvèrent divisés en 2 groupes dont l’un se replia en liaison avec le 158e vers St Benoît, l’autre sur Rambervillers (Caserne).

Le groupe qui s’était retiré vers St Benoît comprenait la musique, une partie de la LHR, les sections de mitrailleuses et des fractions de toutes les compagnies du régiment. Ce groupe était sous les ordres du capitaine Blanchard.

En cours de route, il reçut l’ordre verbal suivant d’un officier d’E.M. sur la route de St Benoît à Bru.

La 49e brigade reste rattachée au 21e corps.

Toutes les troupes disponibles doivent se placer au bivouac face au N les têtes de colonnes à hauteur de la route.

La 87e se placera près des premières maisons à l’E de Bru, la 38e à sa droite.

L’offensive générale doit être reprise demain matin.

 

Bivouac en colonne double à l’emplacement indiqué. Pas de distributions.

26 août

Du général de brigade 

La 87e va suivre la 38e qui se porte sur Rambervillers.

Une formation de rassemblement de la brigade est prise à la sortie E de Rambervillers.

Peu après, la brigade précédée d’une AG constituée par le 38e doit marcher sur Roville-aux-Chênes. Ils s’engagent sur cette route.

Le général de brigade apprenant que Roville-aux-Chênes est occupé par l’ennemi, ordonne à la brigade de faire demi-tour et de marcher sur Romont.

Le 38e prend une formation de rassemblement à la lisière des bois au S de Romont et fait la grand’ halte.

Le 86e, qui n’a pas été ravitaillé depuis 3 jours, fait la grand’ halte entre Romont et Maysuront.

Le général de brigade prescrit au capitaine commandant le 86e de chercher à se réapprovisionner auprès des corps les plus voisins.

Le 38e ne peut rien donner.

Le 98e remet aux corps, après sa distribution terminée, pain, viande de conserve, sucre et café.

Cette distribution représente à peu près 1/5e de ration en pain.

Ces vivres sont consommés immédiatement.

Après la grand’ halte, le 87e lie son mouvement au 98e.

Un officier d’Etat Major du 13e C d’A (corps d’armée) signale à ce moment la présence d’un détachement du 86e ayant cantonné à Rambervillers le 25 août. Et il donne comme indication que le 13e C d’A étant à Romont, des ordres pourront être donnés. Le détachement marche sur Romont où il cantonne avec l’E.M. (état major) de la brigade.

Le général de brigade prescrit de se diriger sur Roville-aux-Chênes le lendemain matin.

Le 87e n’est pas encore ravitaillé.

L’officier d’administration de l’E.M. de la 25e division remet au corps les rations restant disponibles dans ses fourgons, pain, pain de guerre et boites de conserve.

L’ensemble de ces vivres représentant à peu près 1/5e de ration.

27 août

Le détachement de Romont se met en marche sur Roville-aux-Chênes où il arrive à 6 H ½.

Il existait à Roville, depuis la veille, un détachement commandé par le capitaine Chaumeton.

Les 2 détachements sont fondus et le régiment réorganisé.

Le général de brigade donne le commandement du régiment au capitaine Blanchard.


Pertes constatées pour la journée du 25 août :

Officiers          Troupe

Tués                 2                     14

Blessés           11                   276

Disparus           6                   380


Officiers tués : M.M. SOUQUES, capitaine et BASSET lieutenant.

Blessés :      COUTURAUD, colonel

HIGOTHLOGER, chef de bataillon

DARNE, capitaine

CAILLET, lieutenant

MAGNIN, lieutenant

ROLLAND, sous-lieutenant

AUNEDET , sous-lieutenant

ENGLE, sous-lieutenant

DEMINIERE, sous-lieutenant

DEGUIN, sous-lieutenant

GOBILLOT, sous-lieutenant

Disparus : FENETRE, chef de bataillon

GUICHARD, capitaine

TONDEUR, capitaine

BELANBRE, sous-lieutenant

GABRIEL, sous-lieutenant

COUSSERAND, sous-lieutenant


Après réorganisation, le régiment se trouve reconstitué d’après le tableau ci-après :


Tableau de la composition du corps :

Etat Major MM BLANCHARD, capitaine, chef de corps

GUIGUET, lieutenant, officier de détails

GAMOT, lieutenant, officier d’approvisionnement

BERTHOMMIER, lieutenant, porte-drapeau

RICHER, chef de musique et clairon

NENON, médecin aide major de 2e classe, chef de service

1er bataillon

Chef de bataillon : lieutenant PANTALACCI

Médecin : M. THEODAT, médecin

1e compagnie M. GAUDON, lieutenant

2e compagnie M. De CHENERILLES, sous-lieutenant

3e compagnie M. ALEX, sous-lieutenant

4e compagnie M. ROCHETTE, lieutenant

2e bataillon

M. CHAUMETON, capitaine

Médecin : médecin auxiliaire HENRY

5e compagnie  M. DUCLOS, sous-lieutenant

6e compagnie M. SAYN, lieutenant

7e compagnie M. SORBIER, sous-lieutenant

8e compagnie M. GROSCOLAS, lieutenant


3e bataillon

M. HERMANT, lieutenant

Médecin  M. ROUSSET médecin aide-major 2e cl

9e compagnie M. SAVOYE, lieutenant

10e compagnie M. GROS, sous-lieutenant

11e compagnie M. BONNET, sous-lieutenant

12e compagnie M. SERVE, adjudant-chef


Troupe  1722

Les sections de mitrailleuses sont commandées par les sergents adjoints aux chefs de section.


De l’ordre général n° 27 (général de division)

La 1e armée a encore gagné du terrain hier.

La 2e armée victorieuse a entamé la poursuite de l’ennemi qui parait comprendre en face de la 1e armée des éléments des 1e et 2e Bavarois et du 21e C.d’A.

Les positions conquises seront mises en état de défense.

La 25e division partant du front Roville Ardancourt attaquera sur le front Doncières-Domptail- direction générale Flin.

La 49e brigade partant de Roville-aux-Chênes attaquera dans la direction de Doncières. La 5e brigade marchera sur St Maurier-Menu Bois - Kaffevillers.

Premiers objectifs à atteindre : crête de la Grande Pucelle, Xaffévillers et Iloncières.

Après la prise de Doncière la 49e brigade prêtera son appui à la 44e division pour l’enlèvement de Ménarmont.

2 objectifs : position de Domptail, constituée par Bois du Chêne Creux-Domptail, et Bois de la Chambre.

 

800 réservistes du 87e et du 38e partiront de Rambervillers pour Romont à 5 heures et seront mis à la disposition de leurs corps.

Le 86e est maintenu à Roville pendant l’attaque du 38e sur Doncières.

En raison de la canonnade violente à laquelle est soumisle village de Roville, les réservistes sont maintenus à Romont.

20 heures – les Allemands prononcent une contre-attaque.

Cantonnement EM 49e brigade 38e et 86e Roville

Détachement ......... Romont


Tués  :          Officiers     1        M. le sous-lieutenant CAMISOLLE

Troupe       6

Blessés    156

Disparus     7

 

Evacués     7